Du 14 septembre au 26 octobre, de grandes étendues de couleur mates ou brillantes habilleront pour la troisième fois les murs de la galerie Templon de Paris. En effet, le travail de Jules Olitski (1922-2007), une des figures majeures du mouvement Color Field Painting, y sera à nouveau présenté.
Ce mouvement artistique est souvent associé au peintre Mark Rothko, exposé dernièrement à la fondation Louis Vuitton, mais, si la couleur est devenue le sujet des œuvres de cet artiste, elle est également essentielle pour son compatriote Olitski. Présentant d’épaisses couches de couleurs seulement modulées par des effets de lumière, les toiles mises en avant par la galerie Templon en témoignent.
Cependant, bien qu’on ait coutume de situer l’œuvre d’Olitski du côté du Color Field Painting, les tableaux proposés font la démonstration du positionnement particulier de ce peintre qui, loin de choisir entre Color Field Painting et Action Painting, allie les deux courants opposés de l’expressionnisme abstrait.
Intitulée The Mitt Paintings, ce qu’on pourrait traduire par « peintures à la moufle », l’exposition se concentre en effet sur la technique que l’artiste adopte de 1988 à 1993. S’intéressant aux effets de profondeur créés par les différents moyens d’étaler la peinture qu’il expérimente (le pistolet à air comprimé, le rouleau, le chiffon ou encore le racloir), Olitski en vient à vaporiser abondamment de la couleur brute sur ses toiles avant de l’étaler ensuite à l’aide d’une moufle.
Les traces de ce geste manuel sont ainsi visibles à la surface de chacun des tableaux de cette série même s’il faut noter que, pour cet artiste appartenant à la seconde génération des artistes dits « colorfield », l’idée d’une expressivité reflétant l’état d’esprit de son auteur a largement disparu. C’est la tentation d’une réflexion sur la peinture par la peinture qui depuis les années 60 anime Olitski et c’est sans doute ce qui explique qu’il réintègre le geste dans la couleur. Ce geste est celui du peintre – la gamme de gestes à sa disposition pour peindre – et non celui d’un individu animé par des sentiments comme c’était le cas par exemple de Pollock.
Dans ces œuvres qui font suite aux peintures des années 70 et 80 déjà présentées en 2015 et en 2019 par la galerie Templon, Olitski expérimente les effets de la lumière sur la matière. Comme les spectateurs de l’exposition pourront le découvrir, ces essais l’amène à troubler la distinction entre peinture et sculpture. Sous l’effet de la lumière, certaines œuvres semblent être des reliefs directement taillés dans la peinture, elles forment « un jet de couleur dans l’air qui reste là, suspendu » selon les mots de l’artiste lui-même.