Le 12 janvier 2024, lors de son discours de passation de pouvoir, l’ancienne ministre de la Culture Rima Abdul Malak a fait part d’un certain nombre de regrets. Évoquant une « malédiction qui s’est abattue sur le ministère de la Culture depuis plus de dix ans, qui fait que les ministres restent moins de deux ans à leur poste », elle a cité plusieurs projets qu’elle aurait voulu accompagner jusqu’à leur terme. En tête de cette liste de déceptions, Rima Abdul Malak a évoqué celle de « ne pas voir les 101 visages de La Relève ». Mais qu’est-ce, exactement, que ce programme ?
La Relève, tout d’abord, est un dispositif dont l’objectif est de répondre à une difficulté, celle que nos institutions culturelles ont à recruter aux postes de responsabilité. Les métiers de direction d’établissements culturels publics suscitent moins de convoitise qu’auparavant. À ce constat s’en ajoute un autre, les profils qui parviennent finalement à ces postes sont peu variés, moins divers en tout cas que ne l’est notre société.
La Relève entend remédier à ce double problème en formant des jeunes venus de différents horizons aux fonctions de direction d’institutions du spectacle vivant et des arts visuels. Pour ce faire, le dispositif, mené en partenariat avec deux structures, se déploie en deux temps.
Durant une première période qui a déjà commencé et qui devra être achevée en septembre prochain, le ministère de la Culture s’appuie sur Les Déterminés. L’association, dispensant un programme de formation à l’entreprenariat dans les quartiers populaires et milieux ruraux, a pour mission de repérer des personnes susceptibles d’intégrer le dispositif. Celles-ci doivent être âgées de 25 à 40 ans et être intéressées par le monde de la culture, sans obligation néanmoins d’en provenir. Les profils issus du champ social, du monde associatif ou de l’entreprenariat sont également examinés mais les places sont rares puisqu’il s’agit de retenir une personne par département métropolitain et d’outre-mer.
La seconde phase du projet débutera à la rentrée 2024 et sera menée par l’école Sciences Po qui accueillera les 101 jeunes sélectionnés pour une formation qui se poursuivra jusqu’en 2026. En plus de suivre cet enseignement de près de trois cents heures de cours, les personnes sélectionnées seront encadrées par des professionnels de la culture qui les accueilleront pour des périodes d’insertion au sein de leurs structures. La liste de ces professionnels désireux de partager leurs savoir-faire n’est pas encore arrêtée mais l’on peut déjà noter l’engagement des directeurs Rémi Sabau (Le Nouveau Relax, scène conventionnée de Chaumont), Sarah Koné (La Maîtrise populaire de l’Opéra-Comique de Paris) et Francesca Poloniato (Zef, scène nationale de Marseille).
Il est heureux que cette formation se fasse en alternance car, si l’on se réjouit que le ministère de la Culture prenne acte qu’en dépit d’un taux de chômage élevé il existe un véritable dynamisme du tissu associatif témoignant de certains talents dans nos banlieues et campagnes, on peut néanmoins s’étonner que la solution consiste à en sélectionner une centaine pour les faire « monter à la capitale » s’asseoir sur les bancs de la même école.