Le Musée des Arts décoratifs de Paris propose en ce moment une exposition intitulée « La maison pour tous. Une photographie sociale dans les années 1980 ». Visible jusqu’au 28 janvier, elle présente un photoreportage réalisé en 1983 sur la ville de Carros située dans la plaine du Var.
Cette année-là, le commissaire d’exposition Marc Netter, qui vient de fonder une agence de communication, décide de mener un projet sociophotographique autour de cette ville nouvelle. Dans un contexte politique de lancement de nouveaux plans d’urbanisme, il envoie six photographes documenter la vie telle qu’elle s’organise au sein de ce type de cités.
Sabine Weiss, photographe de mode avant de devenir l’une des représentantes de la photographie humaniste de l’époque, Jean Dieuzaide, photographe d’architecture, de natures mortes et du quotidien et membre fondateur des Rencontres internationales de la photographie à Arles, Guy Le Querrec, reporter en Afrique avant de se spécialiser dans la sociophotographie en France, Jacques Windenberger dont les sujets sont la vie quotidienne, l’urbanisme et le travail, et Bernard Gille, le plus jeune de l’équipe, assistant pour l’organisation des Rencontres d’Arles en 1983 et 1984 ; ils se retrouvent tous sur place pour rendre compte de l’existence des habitants de Carros.
C’est donc à travers ces six regards que le spectateur découvre cet espace particulier. Il est par ailleurs plongé dans une époque qui rétrospectivement affiche ses spécificités, notamment politiques. Intitulée La maison pour tous en référence au nom que portaient les maisons des jeunes et de la culture à cette période, l’exposition restitue également les débats sur l’habitat qui agitaient la société d’alors. À travers différents cartels, elle rappelle aussi ceux qui se tenaient autour de la place que la culture, et notamment la photographie, pouvait jouer dans cette réflexion.
Pour tous les photographes dont le spectateur découvre les clichés, la photographie avait un rôle social. En complément d’enquêtes sociologiques, elle devait permettre de documenter certaines situations. Technique d’information, elle pouvait être un moyen d’éclairer la compréhension de la vie en société.
À quelle condition ? La réponse est comprise sur les cimaises de « La maison pour tous. Une photographie sociale dans les années 1980 » où différentes perspectives photographiques (plans serrés ou plans larges, scènes composées ou prises sur le vif) se répondent. Scènes intérieures ou scènes extérieures, architectures ou habitants, les diverses façons dont les photographes considèrent le sujet de « la ville nouvelle » se croisent également. C’est cette multiplicité de points de vue que découvre le spectateur dans cette exposition dense par le nombre de clichés mais aérée dans sa présentation. C’est peut-être dans cette diversité des points de vue, au sens technique comme conceptuel, que résidait la possibilité pour la photographie de participer d’un débat sociétal.