Le 16 octobre dernier, le prix Marcel Duchamp, décerné chaque année par l’ADIAF et le Centre Pompidou à un artiste vivant ou travaillant en France, récompensait Tarik Kiswanson. Sa proposition, accompagnée de celles des trois autres finalistes de cette édition, est à découvrir au Centre Pompidou jusqu’au 4 janvier 2024.
L’expérience du déracinement et du déplacement est au cœur de l’œuvre du lauréat, dont la famille palestinienne a dû émigrer successivement en Afrique du Nord, Jordanie et Suède. Si Tarik Kiswanson présente un travail protéiforme autour de ce sujet, c’est principalement The Wait qui attire le regard, nouvelle version d’un des cocons à échelle humaine créés par l’artiste et déjà remarqués à la dernière Biennale de Lyon. Dans un couloir étroit et accolée à un meuble à tiroirs, la forme ovoïde blanche ressemble à un abri réconfortant. Suspendue au-dessus du sol, elle symbolise également l’inévitable transition entre enfance et âge adulte, à l’image des chenilles se métamorphosant en chrysalides.
Dans la salle attenante, les Constellations de Bouchra Khalili, autre artiste nommée, dialoguent parfaitement avec les installations de Tarik Kiswanson. L’artiste franco-marocaine met en lumière la lutte pour les droits des immigrés, et démontre l’imbrication constante entre mouvement collectif et trajectoires individuelles. Un film participatif décline autour de ce thème commun des récits pluriels transmis oralement : ceux du Mouvement des travailleurs arabes en France dans les années soixante-dix, ou encore ceux plus récents d’immigrés à Athènes.
Bertille Bak et Massinissa Selmani abordent d’autres questionnements également liés à leurs identités personnelles, avec non moins de pertinence et parfois une pointe d’absurde et d’humour.
De cette pluralité de médiums, conjuguant installation, vidéo, dessin ou sculpture, émerge une représentation de la scène contemporaine française riche de diversité, ancrée dans le présent et tournée vers l’altérité. De ce fait, le souhait de Tarik Kiswanson de maintenir l’art comme « un espace où nous continuons à accueillir la différence » semble ici exaucé.