Jusqu’au 10 novembre, l’exposition « Arte será vida », à la galerie Michel Journiac de l’École des arts de la Sorbonne, propose de redécouvrir l’œuvre polymorphe de l’artiste franco-argentine Léa Lublin (1929-1999).
Celle qui disait chercher à « voir clair » a su se saisir de toutes les préoccupations de son époque : féminisme et réflexions sur les violences de guerre, distinction entre nature et culture, entre autres. À la diversité de sujets s’ajoute celle des médiums : peinture et dessin, performance, installation… Dans le contexte de décloisonnement des disciplines artistiques qui marque les années 60 et 70, l’artiste embrasse tous les potentiels de création pour mieux servir son engagement social et sa démarche critique.
À partir de 1965 en effet, Léa Lublin déploie sa pratique, jusqu’alors purement picturale, pour faire participer le spectateur et investir l’espace public. Au cœur de l’exposition se dresse l’un des calicots fabriqués pour la série des Interrogations sur l’art, proposée à partir de 1974 dans plusieurs villes. Sur l’étendard sont peintes de courtes questions à propos de l’essence et du rôle de l’art, auxquelles était amené à réfléchir un public professionnel comme non initié. « L’art est-il sensation », « illusion », « réflexion » ?
Si aucune réponse n’est donnée, l’art de Léa Lublin semble être tout cela à la fois, comme en témoigne la sélection d’œuvres et de documents prêtés pour l’occasion par la collection Nicolas Lublin. Car, selon le credo de l’artiste « Vie-Langage-Art », la création doit instaurer le dialogue, l’image doit convoquer le réel. Elle doit surtout déconstruire les modèles de domination qui conditionnent l’individu, sa pensée et ses perceptions. Ainsi, en 1978, l’artiste décline dans les rues parisiennes ses Interrogations sur l’art en Interrogations sur la femme. Dans un acte de « dissolution » symbolique, la bannière est finalement abandonnée dans la Seine, emportant avec elle les stéréotypes sexistes qui y avaient été inscrits.