Quel impact ont les images sur notre conception des genres masculin et féminin ? C’est l’une des questions que soulève Brainwashed, documentaire disponible jusqu’au 2 décembre sur la plateforme Arte. De concert avec d’autres cinéastes ou spécialistes, sa réalisatrice Nina Menkes y propose une nouvelle lecture du cinéma qui défend la thèse d’un sexisme systémique.
Le film, réalisé en 2022, est structuré autour de la conférence filmée de Nina Menkes « Sexe et pouvoir : le langage visuel au cinéma ». Illustrant quelques notions théoriques par l’analyse de plans célèbres du cinéma, la réalisatrice dresse un constat : la manière de filmer les femmes est empreinte d’un regard stéréotypé et réducteur.
Ce male gaze, défini dans les années soixante-dix par Laura Mulvey et malheureusement toujours actuel, s’enracine à la fois dans la narration et les techniques filmiques : éclairage, cadrage, ralentis et mouvements panoramiques… Autant d’effets qui relèguent la femme au rang d’objet, passive et fantasmée, face à un homme sujet et puissant auquel s’identifie le spectateur. Il est déconcertant de voir à quel point les nombreux extraits décryptés par Nina Menkes -plus de 175- sont construits sur ce même modèle. De la naissance du cinéma à ses dernières années, le male gaze semble n’épargner aucune production, pas même celles qui se voudraient féministes.
Brainwashed entreprend d’abord de déconstruire le mythe hollywoodien et de questionner ses conséquences sur les discriminations ou les violences sexuelles. Mais Nina Menkes montre aussi, avec une note plus positive, le travail de cinéastes qui détournent et rejettent ces codes pour rendre aux rôles féminins leur juste valeur. En écho sont alors cités les mots de l’emblématique Agnès Varda : « Le premier acte féministe d’une femme c’est de regarder, de dire : “d’accord on me regarde, mais moi aussi je regarde.” »