La chaîne Arte propose en ce moment un documentaire sur le saccage des œuvres d’art. Intitulé « Vandalisme artistique » et diffusé en deux volets respectivement nommés « Le dernier tabou du monde de l’art » et « Sur la trace des auteurs », ce reportage revient sur différentes affaires de dégradations volontaires d’œuvres d’art. Bien qu’il l’ait tourné en 2023, le réalisateur Sascha Schmidt n’a pas souhaité aborder le cas récent des activistes écologistes attaquant des chefs-d’œuvre pour attirer l’attention du public sur les problématiques environnementales. Il s’est intéressé à d’autres figures, plus solitaires dans leurs actions mais surtout plus complexes quant à leur rapport à l’art. Du futur galeriste Tony Shafrazi taguant à la bombe le tableau « Guernica » de Picasso à l’amateur d’art Josef Kleer frappant à coups de poing l’œuvre « Who’s afraid of red yellow and blue ? » de Newman en passant par l’artiste français Pierre Pinoncelli, urinant dans le ready made « Fontaine » de Duchamp avant de lui asséner des coups de marteau, c’est le lien très intime que les vandales entretiennent à l’art qui interroge le spectateur. Manifestation d’une frustration incontrôlée ou effroi devant la force du tableau de Newman ? Recherche excessive d’attention ou désir de prolonger l’esprit dadaïste de Duchamp ? Faisant entendre les voix de personnes appartenant à différentes disciplines (psychiatres, journalistes, sociologues) mais rapportant également les propos des iconoclastes eux-mêmes, le film ne donne pas de réponses définitives. Et si le documentaire soulève bien d’autres questions stimulantes (Où se situe la frontière entre restauration et dénaturation ? Comment les musées peuvent-ils simultanément assurer la conservation des œuvres et les exposer publiquement ?), l’une d’entre elles semble les surplomber toutes : ces destructeurs ne seraient-ils pas paradoxalement les spectateurs les plus sensibles à l’art ?
La première vidéo est disponible sur Arte Replay jusqu’au 24 septembre, la seconde jusqu’au 1er décembre.