Santo Sospir est le titre de l’exposition actuellement proposée par Le Nouveau Musée National de Monaco. Appellation aux consonances étranges, c’est aussi le nom d’une demeure située dans la commune voisine, à Saint-Jean Cap-Ferrat. Surplombant la mer, elle fut occupée par Jean Cocteau de 1950 à 1962. Âgé de soixante ans lors de son installation, le poète, peintre, dessinateur, dramaturge et cinéaste français avait pensé y résider une semaine ; il y resta finalement une douzaine d’années. Durant cette longue période où la propriétaire de la villa, son amie Francine Weisweiller, l’hébergeait chez elle, il entreprit de s’approprier l’espace. Dessinant d’abord sur les portes, il en vint très rapidement à couvrir les murs, passant de dessins de constellations prenant la forme de visages à des scènes mythologiques tracées à la ligne claire. Si Cocteau s’est presque exclusivement tenu au noir et blanc pour la réalisation des fresques, il a également orné les murs de tableaux aux touches colorées et fait exécuter une grande tapisserie pour la salle à manger. C’est cette œuvre totale, se déployant sur les murs mais également sur certains plafonds divisés en tracés géométriques et quelques sols composés de galets noirs et blancs, que donne à voir cette exposition. Elle le fait grâce aux photographies de l’artiste contemporain Mauro Restiffe invité à résider dans la villa Santo Sospir en 2018. Le photographe a ainsi pu saisir l’âme de ce lieu atypique avant sa fermeture pour restauration. Cadrant les œuvres de Cocteau mais aussi les objets de son quotidien, il a également su retenir quelque chose de la présence de l’artiste. Parfois en couleurs, parfois en noir et blanc, ses clichés réussissent à transmettre le temps suspendu mais intense en activités créatives qui fut celui de Cocteau durant cette période. En cela, ils prolongent la recherche liant lieu, intimité et mémoire au cœur du travail du photographe brésilien depuis plusieurs années. Ces images intemporelles, puissamment poétiques, répondent aux dessins, peintures et films de Cocteau que la commissaire de l’exposition, Célia Bernasconi, a rassemblés au Musée. Plaçant en regard des photographies de miroirs effectuées par Restiffe les œuvres de Cocteau qui dans la Villa s’y reflétaient, sa proposition curatoriale parachève cette impression d’un espace-temps fermé sur lui-même, seulement habité par l’ombre du poète et artiste français. L’exposition est à voir jusqu’au 15 octobre 2023 à la Villa Sauber.