Plusieurs secteurs cherchent à élargir leur offre à l’ère de la distanciation sociale grâce à la réalité virtuelle (RV) ou à la réalité augmentée (RA) – et le monde de l’art ne fait pas exception. Si les voyageurs passionnés au Japon peuvent embarquer sur un avion pour des vacances virtuelles, pourquoi ne pas permettre aux amateurs d’art de découvrir un Louvre vide depuis leur canapé ou d’accrocher des œuvres d’art à leur mur ? Alors que les musées ont expérimenté avec ces technologies de façon intermittente ces vingt dernières années, d’autres acteurs de l’art développent cette technologie et l’utilisent pour s’adapter rapidement à l’époque.
La réalité virtuelle (RV) est censée être une expérience totalement immersive. Ce type de technologie nécessite un casque et permet aux spectateurs de tromper leurs sens en leur faisant croire qu’ils se déplacent dans un espace numérique. Certains musées d’art ont utilisé la RV pour créer de nouvelles façons dynamiques de vivre l’art. Le Louvre s’est associé à des sociétés de RV pour recréer l’intégralité de sa grande galerie. Non seulement le projet « Beyond the Glass » permet aux visiteurs de se promener dans des salles vides où sont accrochés plusieurs tableaux de Léonard de Vinci, mais ils peuvent également s’approcher de la célèbre Joconde – un exploit presque impossible à réaliser physiquement. Les visiteurs peuvent voir la texture du tableau, explorer le paysage ou examiner son visage de près. Ce projet, lancé avant la pandémie mondiale, s’avérant visionnaire.
Google Arts and Culture a également fait de grands progrès dans le domaine de la RV. Grâce à des produits comme le casque Google Cardboard, ils ont rendu la technologie de la RV accessible à tous ceux qui possèdent un smartphone. Les personnes qui utilisent l’application Google Arts and Culture peuvent ainsi faire neuf visites artistiques en RV, allant de la visite d’un Temple de Zeus en Grèce à l’exploration d’une scène de rue représentée dans l’art romain.
Par opposition à la RV, la réalité augmentée (RA) est une couche d’informations numériques qui s’applique sur le monde réel sous forme de textes ou d’images. La RA ne nécessite pas de casque et peut être utilisée avec la plupart des appareils numériques « intelligents ». Les musées utilisent ce type de technologie depuis un certain temps pour améliorer les points d’entrée dans leurs collections. Aujourd’hui, des entreprises telles que Google et même les marchés commerciaux de l’art développent cette technologie à une vitesse étonnante.
Google Arts and Culture vous permet d’accrocher des chefs-d’œuvre internationaux sur votre mur ou d’explorer des expositions numériques grâce à leur projet « Pocket Gallery » (galerie de poche). Leur collection numérique, The Art of Color (l’art de la couleur), permet aux participants de voir des œuvres d’art du monde entier à travers l’objectif en utilisant la RA. Ce sont des applications gratuites à la disposition de tous les curieux. Mais qu’en est-il des œuvres que les gens veulent acheter pour leurs collections ?
Lorsque COVID 19 a fermé l’Art Basel, à Hong Kong, d’autres foires d’art en ont pris note. De nombreuses galeries d’art commerciales ont accéléré leurs projets préexistants pour passer à des galeries numériques. En mai, la foire d’art Frieze New York est devenue complètement virtuelle avec plus de 200 galeries numériques. Cela a permis aux acheteurs potentiels d’accrocher des œuvres d’art à l’échelle sur leurs murs en utilisant la RA. De nombreuses galeries d’art ajoutent également des contenus plus complets et plus accessibles à leurs œuvres, tels que des interviews d’artistes, des déclarations et des informations historiques.
La demande de contenus culturels via des moyens numériques comme la RV ou la RA est toujours élevée malgré la lassitude des écrans qui touche le monde entier. Il ne fait aucun doute que cette demande d’immersion et d’interaction aura un effet durable sur le marché de l’art et les musées. Lorsque les visiteurs achèteront leurs billets pour voir une exposition, leurs attentes et la façon dont ils espèrent interagir les œuvres changera probablement. Peut-être que moins de gens achèteront des billets et choisiront plutôt de visiter une exposition en pantoufles avec une tasse de café. L’époque où on sprintait dans des foires d’art bondées ou où on entrait dans d’intimidantes galeries cubiques et blanches est peut-être révolue.
Ce type d’adaptation culturelle à marche forcée à la technologie était peut-être inévitable. Il n’empêche que l’acte de physiquement voir une œuvre d’art est bien supérieur à celui de la regarder à travers la lumière bleue d’un l’écran. Il y a beaucoup à dire sur les champions de l’art numérique, qu’ils soient programmeurs, éducateurs ou acheteurs. Ils ont rendu l’art et son histoire plus accessibles à l’échelle mondiale et l’utilisent pour améliorer nos vies en ces temps troublés.