Les grottes de Lascaux, de Chauvet ou de Cosquer sont bien connues pour être de fabuleux témoignages de la vie de nos très lointains ancêtres. Il semblerait que ces derniers n’étaient pas dénués d’imagination, loin de là. En atteste une découverte sans précédent, faite sur l’île indonésienne des Célèbes. On y a mis au jour une « bande dessinée rupestre » que des chercheurs de l’Université australienne de Griffith analysent depuis 2017. On y voit, sur une bande de cinq mètres de longueur datée de 44 000 ans, tout un groupe de chasseurs armés qui poursuivent des buffles et des cochons sauvages. Jusque-là, on pourrait penser qu’il s’agit d’une scène de chasse préhistorique comme les autres.
Mais ce groupe d’hommes est mi-réaliste, mi-imaginaire. Les corps sont humains, mais les têtes sont totalement inventées, stylisées, détournées. Les figures ont la gueule d’un reptile ou celle d’un oiseau, et des plus étranges. Ce n’est pas la première fois que l’on trouve ce type de figure thérianthrope. Il y avait déjà eu une sculpture en ivoire d’un homme à tête de lionne, mais on n’en avait jamais vu dessinées, et sur une aussi grande largeur. L’oeuvre témoigne de la volonté des hommes de raconter leur quotidien, mais aussi de le magnifier. Restent en suspens plusieurs questions : ces êtres mi-humains mi-animaux ont-ils à voir avec l’expression d’une quelconque « spiritualité » ? Les peintres voulaient-ils signifier que tous appartenaient au même monde animal ? Quelles étaient leurs motivations : le seul besoin de se divertir, de laisser une trace de leurs rêves ? Une œuvre qui étonne les scientifiques, mais les inquiète également : en très mauvais état, elle est en train de s’effacer…