Hier s’est ouverte la FIAC avec ses deux-cents galeries pour une trentaine de pays représentés. Des milliers d’œuvres qui rappellent aux chalands qu’il s’agit là d’une foire commerciale, bien plus qu’artistique, tant est médiocre le niveau des œuvres présentées. On est bien entré dans ce que Jean Clair nomme « l’hiver de la culture ». Comme seuls quelques amateurs savent encore lire un tableau, les galeries proposent à la vente des pièces qui n’ont pas besoin d’être lues. Le passage d’un art conceptuel (donc exigeant) à un « art » relevant de l’industrie culturelle s’achève sous nos yeux.
Restent ici et là quelques exceptions : par exemple, les photographies de Wolfgang Tillmans et de Sophie Calle, les sculptures de David Altmejd ou les tableaux de Tim Eitel. La galerie Jousse consacre tout son espace à ce dernier, présentant pour la première fois de petites aquarelles très délicates. Les œuvres du peintre allemand sont parmi les rares à supporter la comparaison avec celles des maîtres du siècle précédent. Car c’est un des rares charmes de la FIAC que de pouvoir tomber, en déambulant dans les allées, sur un tableau de Sam Szafran, un dessin de Balthus ou de Hans Bellmer.
Passer du stand de la galerie Le Minotaure, consacré à l’art de la première moitié du XXe siècle, à celui de la galerie Sadie Coles permet de mesurer l’abîme séparant les créations d’hier et d’aujourd’hui. D’un côté recherche et nécessité ; de l’autre marketing et indigence. Dans son installation vidéo (quatre écrans entourent le regardeur), l’artiste américain Alex Da Corte, grimé en Eminem, petit-déjeune de céréales, fume un bang, démêle les manettes de sa PlayStation, se passe de la moutarde sur les cheveux avant de se coiffer d’une couronne en papier… Sans doute s’agit-il là d’une énième dénonciation de la société du spectacle, mais qu’elle est simpliste ! Est-ce donc là le seul type de dialogue que notre temps peut entretenir avec Guy Debord ?