La première rétrospective consacrée à Terence Delawyer au Festival d’Arles

La première rétrospective consacrée à Terence Delawyer au Festival d’Arles
"Shirley V." - 1955 - par Terence Delawyer.
À voir

Terence Delawyer. Ce photographe de plateaux de cinéma américain ne vous dit peut-être rien. A moins que vous ne soyez un adepte pointu des séries B des années 1940 à 1970. Certaines de ses séries photographiques vont faire le voyage depuis Hollywood et se retrouveront au festival d’Arles, grâce à la découverte d’un photographe français, Laurent Leplaideur, qui nous raconte comment il a découvert cet alter ego.

« Megan Duprez » – 1941 – par Terence Delawyer.

 

Comment êtes-vous tombé sur ces clichés étonnants de Terence Delawyer ?

Laurent Leplaideur : Je fais partie d’une association d’amateurs de vieux films en tous genres, qui s’appelle la JVABE. Ce sont les initiales des gens qui l’ont fondée, il y a quelques années maintenant. Dans ce cadre, j’ai fait un voyage à Los Angeles, notamment aux Studios Universal, où j’ai fait la connaissance d’un guide, qui a perçu mon intérêt pour les vieux films hollywoodiens. Il m’a conseillé un lieu étrange, le Delawyer School of Old qui s’est avéré être à la fois un musée et un atelier de découverte de la photographie. C’est là que j’ai découvert son fondateur, Terence Delawyer, qui fut photographe de plateaux pendant des décennies. Il a fait énormément de photos à Hollywood, des années 1940 aux années 1980 et plus spécifiquement, il était spécialiste du petit Hollywood, tout ce qui est séries B, des petites productions qui se faisaient à la chaîne, mais qui avaient tout autant de mérite d’exister. Il a photographié énormément de comédiens et de comédiennes de l’époque, qui sont totalement oubliés depuis et qui ont joué dans ces films. Il a donc capturé ces étoiles filantes avec son objectif et il a créé au fur et à mesure ce petit musée et cet atelier. Je suis tombé amoureux de son univers et de ses anecdotes sur ce cinéma-là. J’ai discuté avec ses ayants-droit (il est décédé en 2003) et j’ai réussi à les convaincre d’organiser une rétrospective en France, pour la toute première fois et qui aura donc lieu au festival d’Arles cet été.

« Lucius Caan » – 1944 – par Terence Delawyer.

 

Qu’est-ce qui vous fascine dans son travail ? 

LL : Ce qui me touche chez lui, c’est que c’est un conteur, par le biais de ses photos. Il a tenu un carnet où il raconte des anecdotes autour de chaque cliché, diverses et variées, permettant de découvrir les caractères des modèles qui étaient représentés. C’est un formidable voyage à travers le temps, on a presque l’impression de l’entendre derrière nous en train de chuchoter ces aventures photographiques. J’ai fait une traduction de ces anecdotes et avec l’association, on a fait un choix de photos en collaboration avec les responsables du musée. Ce qui n’était pas évident, car il y en a énormément. On en a choisi 25 pour l’exposition.

Comment se fait-il que son travail soit totalement inconnu dans nos contrées ?

LL : J’avais posé la question à ses ayants droit. Je crois que cela tient surtout du fait qu’il y a énormément de photographes à travers le monde et que le monde du cinéma est tout aussi vaste. Ce n’est donc pas étonnant que l’on ait pu passer à côté. Vous savez, c’est un tout petit musée de quartier, qui concerne un Hollywood que l’on n’a pas l’habitude de voir, loin du strass, des paillettes et des grosses stars. Là, ce sont des gens qu’on ne connaît pas, qui travaillaient dans des petites productions fauchées, qui avaient énormément de courage, car ils savaient qu’ils tournaient dans un film qui n’allait pas forcément être très bon. Mais ils se donnaient à fond. Et c’est ce qui touchait et intéressait Terence Delawyer. Lui-même n’a jamais cherché le succès, il s’est contenté de faire de beaux portraits, alors qu’il a rencontré des personnalités connues, comme Brian de Palma. Il y a d’ailleurs une photo de Terence, Blue Crime qui datait des années 1950 et que Brian a beaucoup aimée. Quelques années plus tard, il lui a dit qu’elle l’avait influencé pour son film Body double et je pense que Terence en était très fier.

« Shirley V » – 1956 – par Terence Delawyer.

 

Comment s’est passée la sélection des photos ? 

LL : C’était à la fois simple et compliqué de faire cette sélection. Simple car j’ai agi au coup de cœur et compliqué car ses ayants-droit avaient aussi leur mot à dire dessus. Ils avaient aussi leurs propres préférences et j’avais parfois un avis contraire sur certaines photos.

Que représente pour vous cet univers ?

LL : J’adore le cinéma américain d’un autre âge, les films noirs des années 1940 ou les films un peu politiques des années 1970. Les photographies de Terence sont pour moi comme une vitrine de ces décennies, elles s’inscrivent totalement dans mon propre univers artistique. On y voit l’évolution de la mode sur les femmes et les hommes, des mœurs, de la lumière, de la couleur, car il a touché autant à la couleur qu’au noir et blanc. Chaque décennie à un style et une mode chez lui, on dirait presque des gravures de mode.

« Faya Miller » – 1971 – par Terence Delawyer.

 

Un univers qui va être transposé à Arles… 

LL : C’est la première fois que je fais le festival d’Arles, j’en suis très fier, d’autant plus que ce sera la première fois que les photos de Terence Delawyer traverseront l’Atlantique et se retrouveront en France…

Agence d’Arles, 2 place du Forum, Arles.
Tous les jours de 10h à 19h du 1er au 7 juillet.
Du 8 juillet au 20 septembre, du lundi au vendredi de 10h à 17h.
Vernissage le 5 juillet à 18h30.